Charles Pierre LAVIE
Patron du canot de sauvetage
32 sorties en mer
13 sauvetages individuels
13 équipages et 156 personnes lui doivent la vie



Si, dans un jour de fête, à Dunkerque ou à Calais, vous rencontrez jamais un vieux marin devant lequel les fronts se découvrent, avec une familiarité respectueuse, portant sur sa poitrine dix médailles et la Croix d’Honneur, vous aussi messieurs, saluez!
C’est le patron Charles Lavie, dont le nom de bon augure est légendaire dans ces contrées.
A 55 ans pauvre et malade l’Académie Française lui octroiera un prix de vertu de 3 000 francs.
Etat civil
Naissance le 8 avril 1828 à Calais.
Décédé 18 décembre 1887 à Dunkerque
Données généalogiques
Fils de Pierre Marie LAVIE marin (1792 – 1856) et Anne Marie LEFEVRE (1798 – 1871) Il est le dernier d’une fratrie de 10 enfants
Mariage le 7 septembre 1846 avec Juliette Françoise DELPORTE (1828 – 1863) dont
Juliette Marquerite Joséphine LAVIE. 1848-
Julie Charlotte LAVIE. 1857-1912
Charles Antoine LAVIE. 1861- (Egalement sauveteur en mer – 5 sauvetages recensés)
Henri Pierre LAVIE 1863
Mariage le 3 février 1864 avec Rosalie Sophie Marie BOLLENGIER. (1834 – 1871) dont
Julia Marguerite LAVIE. 1865-
Julia Léonie LAVIE. 1866-
Antoine Henri Charles LAVIE. 1869-
Mariage le 2 septembre 1871 avec Eulalie Palette. (1832 – )
Vie professionnelle
5 ans et 4 mois Marine nationale Quartier maître de manœuvre
2 ans et 1 mois à terre
30 ans et 7 mois Pêche et commerce
Décorations -récompenses
1881 Chevalier de la Légion d’Honneur (Dossier LH/1507/1)
1884 Prix Monthyon Académie Française – Prix de vertu 3 000 Frs
1876 Médaille argent 1° classe Société CSN Services rendus
1867 Médaille de bronze Jury international de l’exposition universelle
(Contribution au progrès et au développement, de la pèche maritime)
1864 Médaille d’honneur Société humaine de Dunkerque – Services rendus
1861 Témoignage de satisfaction Ministère de la marine – Services rendus
1881 Lettre de félicitations Chef du service de la Marine
1887 Témoignage de satisfaction Sauvetages du 2 décembre et 27 décembre 1886
Sorties en mer et récompenses
Charles Lavie effectuera 19 sorties en mer en qualité de patron et 1 en qualité de sous-patron
1845
NC A 17 ans il sauve un homme tombé dans le port
1854
NC Sauvetage de deux mousses tombés dans le port de Calais
1857
/12 Sauvetage de 2 personnes
Charles Lavie se jette à l’eau en pleine mer pour les sauver
NC Sauvetage de deux enfants
A huit heures du soir retire du bassin de la Marine deux enfants de 8 ans et 6 ans
1858
30/01 Sauvetage du KALINKA – Equipage sauvé
7/03 Sauvetage de l’AMIRAL MOORSON – 14 personnes sauvées
1860
/04 Sauvetage du REBECCA – 22 personnes sauvées
Patron du canot
18/12 Sauvetage du ZUAANTJE BOER – Equipage sauvé
Médaille d’honneur en argent Gouvernement Néerlandais
1861
20/07 Sauve dans le port une petite fille de trois ans et demi.
1862
11/04 Sauve, sur rade, un canotier de 69 ans en péril à bord d’un bateau parti en dérive*
1863
03/05 Sauve un mousse de 14 ans
25/03 Sauve dans le port un mousse tombé à la mer
1864
8/12 Sauvetage du JEUNE AUGUSTE – Equipage sauvé
1866
12/01 Sauvetage d’un canot – 3 personnes
1876
14/01 Sauvetage du CYDONIA – 7 personnes sauvées
Montre en or Gouvernement britannique
18/02 Sauvetage du HELVETIA – 7 hommes sauvés
Médaille or 1° classe Ministère de la marine et des colonies
1879
3/11 Sauve dans l’avant-port un enfant tombé à la mer
Médaille or de 2° classe Ministère de la marine et des colonies
22/2 Sauve un homme tombé dans le port qui se serait noyé sans son aide
Témoignage de satisfaction Ministère de la Marine
1880
8/11 Sauvetage du NEPTUNE – 11 personnes sauvées
Sous-patron du canot
Médaille en or 1°classe SCSN
1881
20/01 Sauvetage du DANDY – 7 hommes sauvés
Patron du canot
03/03 Sauvetage du DUPUY DE LOME – Equipage sauvéNC NC
Patron du canot
01/05 Sauvetage du CLIPPER – Equipage sauvé
Patron du canot
11/08 Sauvetage du MABEL – Equipage sauvé
Patron du canot
18/10 Assistance à une galiote
Patron du canot
14/10 Sauvetage du HARMONY – Equipage sauvé
Patron du canot
Montre en or Ministère de la marine et des colonies
27/11 Sauvetage du GLAMORHANSHIRE – 19 personnes sauvées
1882
26/03 Sauvetage du STABAT MATER – 12 personnes sauvées
10/06 Sauvetage du ADOLPHE AUGUSTINE – 4 personnes sauvées
Patron du canot
Chaîne Or Ministère de la marine et des colonies
24/10 Sauvetage du IRENE – 11 personnes sauvées
Patron du canot
13/11 Sauvetage du MINERVE – 5 personnes sauvées
Patron du canot
19/11 Sauvetage du DEUX MARIES – 6 personnes sauvées
Patron du canot
19/11 Sauvetage de l‘INES – Equipage sauvé
Patron du canot
1883
11/12 Sauvetage du ALEXANDRE III – Equipage sauvé
Patron du canot
12/12 Sauvetage du BON PERE ET BONNE MERE – 7 personnes sauvées
Patron du canot
Baromètre Ministère de la marine et des colonies
1885
29 /08 Sauvetage du ALODIA – 8 personnes sauvées
Patron du canot
Témoignage de satisfaction Ministère de la Marine
29/11 Sauvetage du CLAUDINE ET PAUL – Equipage sauvé
29/11 Sauvetage du GOLDEN SHEAF – Equipage sauvé
16/12 Assistance au DUNKERQUE N°1 –
Patron du canot
16/12 Sauvetage de l’ARGO – 1 équipage sauvé
Patron du canot
1886
13/01 Sauvetage du FRAYA – Equipage sauvé
Patron du canot
27/ 12 Sauvetage du INES – Equipage sauvé
Patron du canot
Témoignage de satisfaction Ministère de la Marine
Témoignage de satisfaction SCSN
23/03 Assistance à la PETITE JEANNE
PLUS
Discours prononcé lors de la remise du prix de vertu de l’Académie Française
Regardez là-bas, sur une de ces plages de la Manche où, chaque été, nous allons promener nos élégances languissantes et nos paresseuses anémies. L’hiver est venu . Le vent siffle sur la grève. La mer est lourde et la nuit est noire. Dans une cabane que secoue la bise, un enfant de six ans est debout: Sa mère le tient entre ses genoux et l’enveloppe dans une pesante vareuse qu’elle a tricotée pendant tout l’automne.
Elle lui passe au cou une médaille de cuivre et l’embrasse encore une fois. Le père est là-bas, dans sa barque de pêche, et il attend son matelot. Un instant encore, et, comme les autres, ce petit être appartient à l’Océan, à la vague profonde, au hasard et au danger. A vingt ans, l’État prend ces rudes enfants. Il les embarque sur ses navires. Il les envoie, au gré de sa politique, combattre les flottes formidables de l’Europe, ou guerroyer contre des peuplades barbares, et se faire tuer, ceux-ci par la’ lièvre, dans les marécages du Niger ou du Congo; ceux là dans quelque embuscade silencieuse devant Hanoï, entre le commandant de Villiers et le brave Rivière.
C’est comme eux qu’a commencé Pierre Lavie. A six ans, il était mousse; à quatorze ans, matelot à vingt ans, il était embarqué sur un navire de guerre ; et sept ans après, il quittait la flotte avec les galons de quartier-maître. Bientôt après, il armait un bateau de pêche; et, pendant quarante ans, il a navigué sans repos. Voilà sa carrière officielle.
Mais il a un autre métier, une passion à laquelle il a consacré sa vie. Il est né sauveteur, comme on naît poète, par nature et comme par instinct. La mer est sa compagne et son ennemie. Il vit avec elle; mais il la surveille sans relâche, et chaque fois qu’elle saisit une proie, il accourt pour la lui ravir.
« Un pâtre des Alpes ne connaît pas mieux sa montagne qu’il ne connaît les côtes de la Manche et les courants de la mer du Nord. Il en a tourné cent fois les récifs et lés écueils. Il a sondé tous les fonds de pêche hantés par nos bateaux; et partout, au hasard de sa vie, il a porté son industrie .
C’est à Dunkerque que, presque enfant, il a fait cet apprentissage. A dix-sept ans, il se jetait à la mer pour sauver un homme tombé dans le port. A Dunkerque, à Calais, à la côte, au large, par tous les temps et par . tous les vents, tantôt des épaves isolées, tantôt des équipages entiers : de sa main il a arraché quatre-vingts créatures Et que de drames inconnus dans la grande vie obscure de ces travailleurs de la mer, « qui vivent mouillés », a dit un grand poète, et dont toute l’histoire tient entre la vague qui vient et la vague qui s’en va.
Le 20 janvier 1858, par un gros temps, à cinq lieues au large des côtes de Hollande, Lavie rencontre un trois-mâts russe en détresse. Il gouverne sur le navire et saute, à bord. Il trouve un homme couché en travers du pont. C’est le capitaine. Il est ivre-mort… Et lui seul connaissait la route! Autour de lui, quelques matelots désespérés, perdus dans ces parages inconnus, et allant droit sur des écueils redoutables! Lavie saisit la barre, et, suivi de son bateau de pêche, cet amiral d’aventure rentre au port d’Ostende avec sa flotte désemparée et sa glorieuse capture.
C’est à Ostende encore que, deux ans après, il remorquait un sloop hollandais qu’il avait trouvé coulant bas en pleine mer, et que, malgré les vagues furieuses, il avait abordé, au risque de mettre en pièces son bateau. «
Mais je vous lasserais à vous raconter tant d’exploits. La KALINKA le SWANTJE-BOAR, la REBECCA, la MARIE, la SAINTE MARIE, le JEUNE AUGUSTE, , la CYDONIA, , le HELVETIA, le NEPTUNE; cette année encore l’IRENE et DEUX MARIES : voilà les noms des victoires navales que ce héros inconnu a remportées ; voilà les prises de cet héroïque corsaire.
Aujourd’hui Pierre Lavie a cinquante-cinq ans. Il est malade et il est pauvre. « Si, dans un jour de fête, à Dunkerque ou à Calais, vous rencontrez jamais un vieux marin devant lequel les fronts se découvrent, avec une familiarité respectueuse, portant sur sa poitrine dix médailles et la croix d’honneur, vous aussi messieurs, saluez! C’est le patron Lavie, dont le nom de bon augure est légendaire dans ces contrées. «
En lui décernant un prix de 3,000 francs, l’Académie Française est heureuse de s’associer aux témoignages d’estime et de reconnaissance qu’il a reçus de toutes parts.
Remise de la légion d’honneur au titre de Chevalier
En juillet, la décoration de la Légion d’honneur était remise à Dunkerque au patron Lavie, ancien maître de pêche et patron de l’un des canots de sauvetage de Dunkerque : Lavie avait accompli plus de vingt sauvetages et portait de nombreuses médailles françaises et étrangères; les autorités locales, les représentants de notre Société et de nombreuses délégations des hommes de mer de la contrée ont assisté à la cérémonie, et ont serré la main au vieux loup de mer, plus ému à coup sûr devant ces hommages que devant la tempête.
Sources
BNF Gallica Société centrale de sauvetage des naufragés 1866 – 1939
BNF Gallica Journal Officiel
Base Léonore Dossier de la légion d’honneur